Au coeur de la prévoyance sociale en Afrique

Actualisation et harmonisation des listes des maladies professionnelles

De gauche à droite: Madame Marième Babylas N'DIAYE, Médecin Conseil CSS, M. Innocent MAKOUMBOU, Secrétaire Permanent CIPRES et M. Assane SOUMARE, Secrétaire Général CSS

Du 14 au 17 novembre 2011, s’est tenue à Dakar (Sénégal), la seconde rencontre des experts des pays membres de la CIPRES sur les maladies professionnelles.

Corriger les dysfonctionnements relatifs à une prise en charge efficiente des maladies professionnelles suite aux constats faits par l’Inspection Régionale de la Prévoyance Sociale dans ses différents pays membres occupe la CIPRES depuis quelques mois.

Ces dysfonctionnements proviennent principalement de l’inadaptation du système de reconnaissance et de prise en charge des maladies professionnelles sur la base d’une approche consensuelle face à l’évolution pathologique dans le milieu du travail.

Après une première rencontre à Brazzaville (Congo) en novembre 2010, les Médecins du travail, les Médecins Conseils, les Inspecteurs du travail et les Gestionnaires des risques professionnels des OPS se sont retrouvés à Dakar (Sénégal) pour poursuivre leurs travaux.

Organisée par la CIPRES en collaboration avec la Caisse de Sécurité Sociale (CSS) et l’Institut de Prévoyance Retraite du Sénégal (IPRES) et placée sous la présidence de Monsieur Sada NDIAYE, Ministre du Travail et des Organisations Professionnelles du Sénégal, la rencontre de Dakar a enregistré quarante quatre participants venant de onze pays sur les quinze que compte la CIPRES.

Thèmes des travaux en atelier

Groupe n°1

  • TDR 1 : Actualisation et harmonisation de la liste des MP et détermination des barèmes.
  • TDR 2 : Mise en place d’un cadre de révision de la liste des Maladies Professionnelles.
  • RA 1 : Adoption d’une liste harmonisée de Maladies Professionnelles afin d’obtenir un répertoire unique comportant les tableaux de
    toutes les Maladies Professionnelles identifiées au niveau des Etats Membres de la CIPRES.
  • RA 2 : Recherche sur les pathologies qui ont tendance à s’internationaliser du fait de la mondialisation et de la globalisation de l’économie.

Groupe n°2

  • TDR 1 : Promotion de la pratique de l’évaluation des risques et de l’élaboration d’un document unique dans les entreprises
  • TDR 2 : Rôle d’un Inspecteur de Travail dans le processus de prise en charge des AT/MP
  • RA : Projet de documents à l’échelle supranationale (CIPRES) servant de cadre normatif de référence pour l’actualisation et l’uniformisation des textes des Maladies Professionnelles.

Groupe n°3

  • TDR 1 : Amélioration du système de prise en charge des Maladies Professionnelles
  • TDR 2 : Harmonisation des supports de collecte d’informations
  • RA 1 : Modèle de fiche technique de présentation des Maladies Professionnelles,
  • RA 2 : Un modèle uniformisé de déclaration des Maladies Professionnelles.

La cérémonie d’ouverture de cette rencontre a été marquée par plusieurs allocutions dont celles des Directeurs Généraux et des Présidents des Conseils d’Administration de la CSS et de l’IPRES. Dans son intervention, le Secrétaire Permanent de la CIPRES a rappelé l’objet et les objectifs que vise la CIPRES à travers cette rencontre.

Objet et objectifs qui se résument en l’actualisation et l’harmonisation des listes des maladies professionnelles ainsi que des documents de prise en charge des risques professionnels en général et des Maladies Professionnelles (MP) en particulier. Il a précisé que ceux-ci s’inscrivent dans le processus de révision des dispositions applicables à la gestion des branches techniques lancé le 29 janvier 2001 à Douala au Cameroun et ajouté que les conclusions doivent aboutir à un référentiel unique en matière de prise en charge des maladies professionnelles dans la zone CIPRES.

Il a, pour terminer, insisté sur la révision des paramètres de prise en charge des maladies professionnelles longtemps restée en léthargie dans la plupart des Etats membres de la CIPRES.

L’honneur est revenu à Monsieur le Ministre du Travail et des Organisations Professionnelles de clore le chapitre des discours et de déclarer l’ouverture officielle des travaux. Dans son propos, Monsieur le Ministre est revenu sur les constats faits par les experts à la rencontre de Brazzaville. Il a souligné que ces constats non exhaustifs semblent liés au manque de concertation entre les différents acteurs intervenant dans la prise en charge des maladies professionnelles et surtout, à l’absence d’un cadre de reconnaissance des maladies professionnelles dans certains pays. Il a de ce fait émis le voeu que les travaux parviennent à trouver des solutions pour y remédier.

Au programme de cette rencontre figuraient des communications, des travaux en atelier et une plénière. Les communications ont été faites par des représentants de certains Etats membres sur la situation des maladies professionnelles dans leurs pays respectifs et le partage des difficultés et des avancées enregistrées dans la prise en charge desdites maladies. Les débats qui ont suivi ont permis de répertorier les difficultés.

Les travaux en ateliers ont vu une répartition des participants en trois groupes qui ont travaillé sur des termes de référence (TDR) et des résultats attendus (RA). (Voir encadré)

Au terme des échanges, le premier groupe a réfléchi sur la détermination des barèmes et arrêté une liste de 89 maladies professionnelles contre 95 à Brazzaville et distingué quatre (4) groupes de pathologies que sont celui des pathologies d’origine chimique au nombre de 58, le groupe des pathologies d’origine physique au nombre de 8, le groupe des pathologies d’origine biologique - infectieuse - parasitaire au nombre de 21 et le groupe des pathologies d’origine diverse au nombre de 2.

Ce groupe propose, en réponse au TDR 2 (voir encadré page 5), la mise en place, sous les auspices de la CIPRES, d’un Comité Technique d’Experts chargé de la finalisation de la liste des tableaux des maladies professionnelles. Ce Comité devra réfléchir sur la définition de ce cadre, mais aussi compléter les tableaux de maladies professionnelles existantes. Il sera également procédé à la détermination du délai ainsi que du barème de leur prise en charge et à la détermination des principaux travaux susceptibles de provoquer ces maladies.

La mission du deuxième groupe était de proposer dans un premier temps, un cadre normatif de référence pour l’actualisation et l’uniformisation des textes des maladies professionnelles dans la zone CIPRES ainsi que de définir le rôle des Inspecteurs du Travail dans le processus de prise en charge des risques professionnels. Puis de définir, en second lieu, les tâches à confier à l’Inspecteur du Travail.

Il est ressorti des échanges de ce groupe que l’évaluation des risques incombe à l’employeur et devrait concerner tous les milieux de travail. Les objectifs de cette évaluation peuvent se décliner en l’identification globale, exhaustive et précise des dangers et des facteurs de risque, l’analyse des modalités d’exposition des agents, la caractérisation, l’estimation et la hiérarchisation des risques, la mise en oeuvre des actions préconisées pour maîtriser les risques et le suivi-évaluation des actions.

Cette évaluation devra aboutir à l’élaboration d’un document unique qui sera le tableau de bord de toutes les actions de prévention menées ou projetées au sein de l’entreprise et qui constituera un guide de repérage des risques et facteurs de risque au sein de l’entreprise.

Ce document unique devra être dynamique et évolutif, car il devra prendre en compte tout changement et tout progrès au sein de l’entreprise. Il constituera le pivot central pour une amélioration continue du système de management de la santé sécurité au travail (SST). Son élaboration nécessite une équipe pluridisciplinaire d’hommes de qualité, tant internes qu’externes à l’entreprise et l’utilisation d’outils performants. A cet effet, le groupe a proposé des modèles de support.

Se prononçant sur le second point, le groupe 2, après avoir passé en revue les missions et prérogatives de l’Inspecteur du Travail et de la Sécurité Sociale en général, a défini les tâches à confier à l’Inspecteur du Travail afin de renforcer son apport dans le domaine de la santé, sécurité au travail. (Voir encadré)

Le troisième groupe a examiné plusieurs modèles de déclaration de maladies professionnelles, et retenu un modèle commun qu’il a soumis à la plénière.

La plénière a adopté les résultats des travaux de tous les groupes en l’état, excepté le modèle commun de déclaration de maladies professionnelles proposé par le groupe 3 qui l’a été, sous réserve d’intégrer les compléments d’informations relatifs aux voies de contamination, à la visite d’embauche, aux antécédents congénitaux, etc.

Les travaux ont pris fin le 16 novembre par une cérémonie rehaussée par la présence de Monsieur Babacar THIAM, Directeur du Travail et de la Sécurité Sociale, représentant le ministre du Travail et des Organisations Professionnelles du Sénégal.

Tâches à confier à l’Inspecteur du Travail

  • éclairer par leurs conseils les employeurs pour renforcer la prise en charge des questions de santé et de sécurité au travail qui ont des implications directes sur la productivité des entreprises ;
  • renforcer l’installation des « Comités Santé Sécurité au Travail » et veiller à leur opérationnalité ;
  • intégrer, dans les législations nationales des Etats membres de la CIPRES, l’élaboration du Document Unique qui procède de l’obligation des employeurs d’évaluer les risques professionnels ;
  • renforcer les pouvoirs et moyens juridiques, matériels et humains de l’administration du travail et de la médecine du travail ;
  • mettre à jour les législations du travail et de la sécurité sociale ;
  • renforcer les compétences des agents de contrôle des Inspections du Travail et de la Sécurité Sociale, des Services de Prévention des Organismes de Prévoyance Sociale et des médecins du travail dans le domaine de la Santé Sécurité au Travail ;
  • mettre en oeuvre la recommandation 200 concernant le VIH et le sida en milieu du travail.

Recommandations du groupe 2

  1. Elaborer un cadre juridique harmonisé : Loi sur la Sécurité et Santé au Travail, Loi sur les AT et MP et les décrets d’application ;
  2. Intégrer la Santé au Travail dans les fonctions managériales de l’entreprise au même titre que la production, les finances … ;
  3. Promouvoir la communication interne en ciblant toutes les parties prenantes au sein de l’entreprise en vue du développement de la santé et sécurité au travail ;
  4. Renforcer la formation des ressources humaines en Sécurité et Santé au Travail : dirigeants et intervenants au niveau central (Politique et stratégique), intermédiaire (Gestionnaire) et périphérique (Opérationnel) ;
  5. Accorder la priorité à la prise en charge du risque Chimique, eu égard à l’importance et à l’intérêt de la question ;
  6. Mettre en place un réseau CIPRES des intervenants dans la prévention des risques professionnels et promouvoir l’utilité et l’utilisation des TIC, de la télémédecine et de l’e-learning.

 

Recommandation du groupe 3

  1. la mise en place des supports de gestion standardisés des AT/MP dans tous les pays membres de la CIPRES ;
  2. la création dans les pays membres de la CIPRES, d’un comité de reconnaissance des maladies à caractère professionnel ;
  3. la création d’un comité technique chargé du suivi de la mise en oeuvre des recommandations des présentes assises ;
  4. la vulgarisation du formulaire de déclaration des maladies professionnelles adopté lors des de cette rencontre ;
  5. la fixation d’un délai maximum de déclaration de 15 jours ouvrables à partir de la constatation médicale de la maladie pour l’employeur, et de 2 ans pour le travailleur ou ses ayants droit.